Comment gérer ses perspectives face à l'incertitude ? Comment patienter ? Comment gérer son identité face à l'Etat Providence ?

Publié le 6 janvier 2021 à 14:23

Nous différons nos rencontres avec nos amis, notre famille, nous patientons. Et nos projets dans tout cela ? Différer
nos projets n'implique pas seulement notre bonne volonté et notre résolution à accepter le bien commun (le
confinement de chacun pour le bien de tous) ? Les conséquences sont importantes car les projets sont divers.
Plusieurs vont au-delà des visites culturelles organisées et annulées, au-delà des festivités prévues et
décommandées. Il y a ceux qui engagent davantage notre identité : professionnels ou non !
Au moment du premier et du second confinements il y avait des entrepreneurs qui gardaient à flot coûte que coûte

une entreprise familiale transmise depuis plusieurs générations, la conservant pour leurs enfants. Il y avait des auto-
entrepreneurs qui se lançaient tout juste, qui tentaient une reconversion professionnelle, un second virage longtemps

préparé. Il y avait des personnes qui avaient investi beaucoup d'efforts pour organiser le temps rare d'une cousinade
de 100 personnes, 200..., leur permettant de retrouver, au-delà des simples membres d'une familles, de véritables
racines. Il y avait ceux qui venaient de trouver un sens à leur vie dans le sentiment d'être utile grâce aux heures
hebdomadaires consacrées à une association impliquée concrètement et efficacement. Et que dire des étudiants
dont beaucoup trop en cette fin d'année ont demandé des rendez-vous auprès des professionnels ? Découragés après
avoir enfin trouver leurs voies, car ils ne pourront pas payer un redoublement si ils ne décrochent par leurs
diplômes et le risque est bel et bien là faute d'une qualité d'enseignement suffisante pour les réussir ?

Notre identité ne nous est pas donnée, ni à la naissance, ni à la manière dont on reçoit un cadeau, on le sait. On peut
la découvrir par surprise, presque malgré soi pourrait-on dire, ou on la cherche volontairement avec efforts, mais on
en a tous besoin. Ce n'est pas une affaire d'adolescent !! Quand on parvient à trouver, ou à concevoir, quelque chose
qui nous parle, on se met en quête des conditions dans lesquelles on pourrait le vivre, le pérenniser. Or qu'il s'agisse
d'une identité familiale à travers une entreprise, ou à travers un passé retrouvé tous les 2 ou 3 ans, d'une identité
professionnelle payée au prix fort d'une formation difficile, ou d'une identité dans l'aide aux autres ; elles sont
toutes suspendues. Quelles conséquences alors pour ceux concernés ? Ce n'est pas juste une question de patience.
C'est bien plus ! Dire « je » quand on a plus grand chose à vivre de soi, hormis le manque d'une identité attendue,
espérée, c'est brandir un « je » pauvre, découragé voire littéralement vidé.
Les conséquences financières sont extrêmement importantes car l'argent loin d'être sale ou vil est la condition la
plus sûre de notre sécurité réelle. Mais malheureusement, des conséquences d'un autre genre peuvent être toutes
aussi terribles : celles psychologiques de la mise entre parenthèses de nos identités. Ne plus pouvoir vivre des
perspectives qui nous ressemblent subjectivement, ressentir l'anonymat, voilà ce dont il faut essayer de comprendre
et d'anticiper les effets sur nous avant de les vivre de plein fouet.
Que tenter face à ce risque de perdre les investissements dans lesquels nous avons absolument besoin de nous
reconnaître ? Si SARTRE a raison et que « nos actes contribuent à nous faire » (Note bas de page : l'Etre et le
néant,) alors comment continuer à nous « faire » si les actes en lien avec qui nous sommes doivent diminuer pour
un certain temps ? Le temps nécessaire, il nous faut garder en tête, consciemment et volontairement, l'essentiel de
ce que nous savons de nous puisque le réel extérieur nous offre moins d'occasions d'en faire l'expérience et de le
ressentir. En règle général nous pouvons être un peu fainéant et attendre que le réel nous fasse vivre ce qui est
important pour nous, plutôt que de le découvrir à l'avance grâce à la compréhenion de notre passé. Mais
actuellement, cerner, ressaisir avec un professionnel, l'ensemble de ce qui nous constitue, les branches essentielles
de qui nous sommes, et pourquoi nous avons besoin de nous diriger dans telles ou telles directions, est
certainement la meilleure manière en cette période de crise d'éviter de se sentir vide de soi.

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