Les jeunes peuvent-ils encore croire en l'avenir ?

Publié le 20 janvier 2021 à 14:24

Cette question suppose d'une part que l'on comprenne la nécessité pour l'homme de croire et d'autre part que l'on
comprenne ce que peut signifier l'avenir pour une jeune de 20 ans. La croyance c'est adhérer à une idée en l'absence
de connaissance véritable quant à cette idée. La croyance n'est donc pas une erreur car l'erreur est une affirmation
fausse, non conforme à la logique. La croyance est peut-être une affirmation facile mais elle est surtout apaisante.
Elle est construite pour échapper au critère logique, échapper à la démonstration de sa vérité ou de sa fausseté, car
elle apaise l'homme qui y croit (Note de bas de page : croire en Dieu ne permet ni de démontrer ni de réfuter qu'il
est ou bienveillant, ou guérrier, ou en toute logique sans attente de par sa perfection). Affronter la réalité telle
qu'elle est, sans l'imaginer telle que nous la désirons, l'homme en est-il capable ? Sans doute que non !
Croire en quelque chose c'est souvent croire en quelque chose qui est porteur, fécond, qui s'approche de ce que nous
désirons comme un mieux, un bien...On voit la nécessité pour l'Homme de croire en quelque chose de mieux que la
réalité, quand on voit ce qui reste de cette nécessité chez nous adultes. Il suffit pour cela de chercher le sens que les
adultes mettent sous l'expression « croire en l'avenir ». Bien souvent pour eux il est question de s'apaiser en
imaginant satisfait leur désir de sortir de tous les problèmes connus. Ainsi croire en l'avenir aujourd'hui, c'est croire
que la génération future fera mieux, qu'elle coupera la chaîne de ce qui va mal. Et si ce n'est la génération future, ce
seront les épaules de l'Etat Providence qui porteront les solutions à nos mauvais choix. Elles devraient règler tout,
malgré nous.
Mais pour les jeunes, croire en l'avenir signifie une valeur bien différente (souligner cette phrase). Pour eux croire
en l'avenir est synonyme de réussir sa vie. Rien de moins. Car ils ne peuvent pas croire en quelqu'un d'autre qu'eux
puisqu'il n'y a pas d'autres adultes qu'eux à venir, ils sont les autres adultes à venir. Ils ne peuvent pas davantage
penser que croire en l'avenir c'est croire que tout se règlera malgré eux par un Etat Providence, puisque la demande
d'être pris en charge qui sous-tend la notion d'Etat Providence implique l'on se sente démuni, impuissant, après
avoir échoué dans ses propres tentatives. Or les jeunes ne peuvent pas désirer être pris en charge tant qu'ils n'ont pas
échoué dans leur désir d'une vie réussie. Alors si pour eux croire en l'avenir c'est réussir leur vie individuellement,
peuvent-ils encore entretenir, soutenir, faire vivre cette croyance-là ? Peut-on se représenter son avenir, peut-on
vouloir être heureux, imaginer faire ce que l'on décide de faire, quand l'Histoire nous bouscle ? Peuvent-ils espérer
vivre leur (souligner « leur ») vie quand la contagion d'un virus met en difficuté les entreprises, l'économie, les
rencontres, les stages, les apprentissages, la durée des liens et même la résistance naturelle de la jeunesse du corps ?
Oui, si l'on se rappelle ce qui est à la racine de la croyance et ce qui est à la racine de la vie réussie : le désir ! Si
réussir sa vie c'est vivre sa vie, si réussir sa vie c'est être un adulte qui a réalisé son rêve d'enfant, si il ne s'agit pas
de satisfaire des caprices mais bien de faire ce que l'on avait décider de faire (sans décider des voies qui nous

attendent pour cela), alors maintenir cette croyance est possible à la condition de ne jamais renoncer à son désir
(Note de bas de page : J.J.Lacan, psychanalyste et psychiatre. Ouvrage : Séminaire VI)
[4]
. Si « notre vie est ce qu'en
font nos pensées » (Note de bas de page : Marc Aurèle, empereur romain et philosophe stoïcien. Ouvrage : Pensées
pour moi-même)
[5]
il est important de saisir nos désirs fondamentaux afin que ce soient eux qui fassent naître nos

idées, la pertinence de nos futures démarches.
Dès lors, comment faire pour ne pas renoncer à ses désirs fondamentaux ? Savoir déjà ce qu'ils sont. Si ils sont à la
base de la personne singulière que nous sommes, il faut les distnguer des envies passagères (le choix d'un secteur
professionnel n'est pas identique au souhait de l'argent facile), et des envies inoculées par les autres (perpétuer tout
au long de sa vie des fêtes amicales ne satisfera certainemet pas le désir de créer sa propre famille-ressource) . Il
faut ensuite s'y installer comme en soi, afin de les renforcer face aux craintes par lesquelles l'Histoire nous
bouscule.
Depuis le début du second confinement, beaucoup de jeunes de plus de 18 ans ont consulté un psy, après avoir saisi
intuitivement qu'ils étaient envahis par des craintes qui n'étaient pas les leurs et que face à elles il leur fallait trouver
en eux ce qui leur était essentiel de réaliser dans leur vie.

« le meilleur travail n'est pas celui qui te coutera le plus mais celui que tu ferras le mieux » Sartre

Ajouter un commentaire

Commentaires

Il n'y a pas encore de commentaire.